« Attention, t’as vu tes
doigts !? » disait mon père, comme j’essayais enfant de me couper une
tranche de quelque chose. Je ne savais pas alors si ce qu’il fallait craindre
le plus, c’était la chose en question, le couteau, mes doigts ou cette voix qui
mettait en garde contre les dangers qui résultaient de mes premières tentatives
d’autonomie. Domestiques, s’entend, car pour nous les filles, il n’était pas
question d’autre chose.
Que n’est-il aujourd’hui en
état de me dire : « Attention, t’as vu ta tête !? » comme
j’essaie contre toute raison d’arracher du bonheur à ce monde qui s’écroule.
L’émancipation, attention,
c’est comme la joie. On y prend goût !
2001