La Bataille de Notre Dame des
Landes
Tenture
de Jeanne Hyvrard
2012
1 mètre sur 0,58
Illustration sous ce
nom de la série d’escarmouches qui durant plusieurs années ont vu les Forces de
l’Ordre affronter les Eco-guerriers, défenseurs de la Nature et de
l’Agriculture farouchement opposés au projet de construction d’un nouvel
aéroport international au Nord Ouest de Nantes.
Celui-ci remontant aux
débuts des Années Soixante et ayant déjà été retardé par divers épisodes
administratifs et judiciaires auxquels se sont ajoutées les occupations
durables du terrain et les actions violentes ou non pour en défendre sinon la
propriété au moins la possibilité d’usage.
Ainsi les lieux d’abord
globalement qualifiés de Zone d’Aménagement Différé sont-ils devenus au fil du temps une Zone A Défendre par
une nouvelle catégorie de militants volontaires désormais dénommés du même
coup, les Zadistes.
Cette Bataille de Notre-Dame des
Landes est alors devenue le symbole
de l’affrontement de deux conceptions de l’utilisation du territoire, conflit
caractéristique des bouleversements à l’œuvre dans ces débuts de XXIe siècle.
Les tenants d’une
planète dérégulée, tout entière consacrée à l’exploitation économique, technique
et financière s’opposant dans cette bagarre à rebondissements, à ceux qui
tentent de préserver une niche écologique vivable pour l’ensemble de l’espèce
humaine voire de toutes les espèces vivantes. Le traditionnel binarisme
franco-français transformant ensuite le conflit en bataille rangée.
La tenture a été
fabriquée par la méthode dite des Appliqués
dont l’auteure a eu connaissance lors de son séjour à la Martinique de 1969 à
1971, de vingt quatre à vingt six
ans. La méthode a été importée d’Afrique au temps de l’esclavage Outre Mer mais était déjà utilisée au Moyen Age en Europe.
Cette technique une
fois rencontrée n’a pas cessé d’être pratiquée par l’auteure qui dès son retour
dans l’Hexagone avait commencé une série d’une douzaine de tentures sur le
thème de la Colonisation dont seules deux ont pu pour le moment être réalisées,
le surgissement brutal du flot littéraire fin 1973 ayant alors polarisé son
activité créatrice vers d’autres projets.
Le fond de la tenture
est un morceau de couvre lit conjugal en coton en provenance des Indes, réformé
faute d’avoir pu résister convenablement au lavage. Il a été utilisé de
préférence sur l’envers afin de faire apparaître un fond noir mieux adapté à
des échauffourées dont beaucoup ont eu lieu la nuit.
Les morceaux appliqués sont comme d’habitude chez
l’auteure en provenance d’un stock de tissus constitué au fur à mesure que la
réforme des vêtements permet la récupération de ce qui est encore utilisable.
Cette façon de faire lui ayant été inculquée dans l’enfance d’après guerre lors de laquelle la règle était de conserver
ce qui - selon la formule maternelle - pouvait
servir.
Procédure rendue
nécessaire par les réalités matérielles et permettant comme chez les pionnières
de l’européanisation de l’Amérique de fabriquer ou réparer des vêtements sans
attendre d’essentiels approvisionnements textiles qui ne viendraient pas
nécessairement.
Mais au-delà de ces
manières apprises pour raisons historiques et économiques, l’auteure en à
conserver l’habitude en la réorientant au bénéfice de ses activités artisanales
et artistiques. Le tournant ayant été pris par l’intermédiaire du tricotage de
couvertures artistiques sur le modèle des africaines ou de celles produites
dans les ouvroirs traditionnels des dames de charité réutilisant les restes de
laine joliment agencés.
Ainsi les éléments du
décor de cette tenture de La Bataille de Notre Dame des
Landes - végétations et constructions
- sont-ils issus des restes de vêtements familiaux. Des boutons de céramique
ont été ajoutés par l’auteure pour figurer les différentes catégories de
belligérants. Les Forces de l’Ordre dans les tons bleus, les Défenseurs de la
Nature en blanc.
L’auteure a ajouté au
dos de la tenture sur une toile spécialement affectée à cet usage, un
légendaire textile indiquant la provenance détaillée de chacun des tissus.
Notamment l’arbre vert découpé dans une robe portée par sa mère lors du voyage
en Italie en 1949, la maison en écossais gris et rose dans une chemise de son
père à la fin de sa vie, l’arbre violet dans le costume en velours et dentelles
porté par la réalisatrice au Salon du Livre en 1990 au Grand Palais, le jean de
la maison et les deux arbres centraux dans des vêtements maritaux. Les feuilles
vertes provenant de leur côté de tissus conservés dans le grenier des beaux
parents et les autres textiles de sources ejusdem farinae.
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Mise à jour : décembre 2015