Cherchant sur la Toile des nouvelles de ce résistant déporté qui avant de mourir pour la France avait été lors de leurs courses dans le massif du Mont Blanc le compagnon de cordée de mon père, j’ai lu dans un journal de Luchon où il avait été arrêté en 1944, une annonce de sa petite nièce qui en quêtait également. J’ai eu l’idée d’écrire alors ce texte pour remettre en perspective ce que j’avais déjà reconstitué de cette tragique histoire. Il a été mis en ligne par Luchon Magazine, le 15 Avril 2017.

 

Qui se souvient de Jacques Liddell et du passé qui ne passe pas ?

 

Dans l’abondance et la diversité des moyens d’information d’aujourd’hui, les jeunes générations n’ont pas l’idée de ce qu’était le monde de l’Après-Guerre et dans quel mensonge et quel silence notre génération à nous, née comme le conflit durait encore - même s’il était sur sa fin - ont dû vivre et se construire.

Il n’était pas question de l’extermination des Juifs et le film de commande La Bataille du Rail de René Clément primé au festival de Cannes de 1946 n’avait eu aucun mal à nous persuader d’être du bon côté de l’Histoire dans un pays dans lequel tout le monde avait été résistant.

Quant aux Camps d’Extermination, il n’était pas question de les distinguer de ceux dits de Concentration et d’ailleurs il n’y en avait eu aucun en France, si on exceptait celui de l’Alsace, dont il ne fallait pas s’étonner puisque cette province était limitrophe de l’Allemagne seule responsable de tous les maux.

Il n’y avait pas non plus plusieurs catégories de déportés, les raciaux se mêlaient à ceux du travail. D’Auschwitz on ne connaissait que la petite photographie du portail en noir et blanc qu’il arrivait à certains magazines de publier. C’était dans une contrée lointaine, pas tout à fait le bout du monde, mais presque.

Il était impossible d’en savoir davantage sur ce qui s’était effectivement passé – les cinquante millions de morts - même en questionnant les parents qui ne répondaient pas et manifestaient d’une façon ou d’une autre qu’ils ne souhaitaient pas qu’on poursuivre sur ce sujet, cela à une époque où déjà il n’était pas si fréquent de parler avec eux. On leur obéissait et c’était tout. J’ai donc obéi mais n’ai pas pu oublier Jacques Liddell dont le nom revenait quelquefois comme un mystérieux absent dont la disparition m’a été au fil des années, paradoxalement de plus en plus douloureuse.

A l’occasion, enfant j’avais entendu ma mère dire qu’il était pendant la guerre venu annoncer à mes parents qu’il avait été dénoncé et qu’il devait s’en aller. Elle disait aussi que mes géniteurs lui avaient alors proposé de rester chez eux avec eux mais qu’il n’avait pas voulu. Une autre fois c’était une autre version, c’était lui qui avait demandé et il avait reçu une fin de non recevoir. C’était trop petit, il n’y avait pas de place et il y avait les enfants. Impossible de savoir au juste ce qu’il en était.

Par la suite comme j’étais élève au Lycée Hélène Boucher à Paris, mon père était ce qu’on appelait alors Le Correspondant des deux filles de Jacques Liddell, elles-mêmes internes dans le même établissement, ce qui leur permettait d’effectuer des sorties en ville puisque alors c’était Le Correspondant qui répondait d’elles. Elles venaient quelquefois avec le père du résistant défunt, un vieux Monsieur très digne avec qui mes parents parlaient éventuellement de Jacques mais tout aussi bien et surtout, d’autre chose. De ce qu’on range parfois dans la catégorie de la pluie et du beau temps.

Tout cela était très confus, et comme je cherchais à mettre de l’ordre dans ces bribes en questionnant ma mère, tentant déjà de comprendre comment il était mort puisqu’apparemment c’était cela qui réunissait les personnes en question, j’étais frappée de l’hostilité avec laquelle elle mettait fin à la conversation d’un comme ça au bord d’une route, dont la désinvolture me hérissait.

Je trouvais qu’il y avait une insupportable contradiction avec le fait de recevoir les filles et le père de l’homme en question. Mais pas moyen d’en apprendre davantage !... Elle finit même par me dire un jour qu’elle ne voulait plus du tout que je lui parle de tout cela. Et sur un ton tel que je ne m’y risquai plus.

Au coup par coup au fil du temps, j’ai pourtant appris qu’il avait été le compagnon de cordée de mon père et écrivant ce jour ce récit - parce qu’il est apparu sur la Toile miracle de l’électronique, par l’intermédiaire de Journal Luchon Magazine que sa petite nièce en cherchait des nouvelles - j’ai sous les yeux le carnet de bord de ma mère qui femme d’avant-garde escalada de sa propre initiative l’Aiguille du Midi en 1931 à l’âge de 20 ans. C’est elle qui entraina mon père dans ce genre d’activités d’alpinisme, pas si fréquentes à l’époque. Notre jeunesse en a été illuminée.

En tournant les pages de ce petit carnet de mauvais papier et à couverture beige, je pourrais dresser la liste des courses de montagne lors lesquelles leur ami - qu’elle appelle tantôt Liddell tantôt Jacques - les accompagne et comment s’est passée l’expédition, combien de temps elle a duré et quel temps il a fait !

J’y lis toute la liste assez dense des étés 1937, 1938 et 1939. Le 12 Août ils y sont toujours comme la guerre va éclater une quinzaine plus tard … Du coup c’est la photographie de mes géniteurs en haut du Mont Blanc que j’ai mise sur mon site Internet car je suis bien du coup moi-même la fille de ces gens-là.

Et puis au fil des années cet antagonisme entre leurs courses en montagne, le rôle que cela avait joué dans leur vie puisque c’était dans ce cadre qu’ils s’étaient rencontrés en 1936, l’exaltation de la haute montagne qu’ils nous ont transmise et qui me bouleverse encore aujourd’hui, leur refus de nous parler de leur vie aussi bien durant la Guerre qu’auparavant, ce déni de transmission a généré au fil des ans un certain malaise.

La dénonciation de leur compagnon des jours heureux, le refus qu’ils m’en disent davantage a même abouti par me rendue malade. Le silence sur la disparition de Jacques Douglas Liddell déporté mort pour la France a même fini par me devenir insupportable.

Le premier point ferme dans ce marais de doute, d’angoisse et de révolte a été la projection au Ciné-Club du Lycée Voltaire à Paris que nous les filles d’Hélène Boucher dans l’arrondissement d’à côté étions autorisées à fréquenter, du film d’Alain Resnais Nuit et brouillard réalisé en 1956.

Nous étions alors en 1962, moi-même en Terminale, la Guerre d’Algérie continuant ses horreurs importées jusqu’au cœur de la Capitale, et j’entendis médusée le Professeur Vilain qui enseignait l’allemand quand il ne s’occupait pas de son projecteur nous dire, faisant allusion aux mauvais traitements dont étaient victimes ceux qu’on appelait les fellaghas : Prenez garde à l’accoutumance!

Le 19 Décembre 1964, installée par un appariteur qui m’aimait bien - simplement parce que je lui disais bonjour - c’est debout sur le bureau du Doyen de la Faculté de Droit sur lequel il a pour le protéger précautionneusement posé des journaux que je regarde en compagnie de quelques-uns de mes condisciples qu’il avait également à la bonne, par la fenêtre ouverte donnant sur la Place, Jean Moulin entrer au Panthéon accompagné d’un discours d’André Malraux qui m’interpelle directement de son Jeunesse de France !

J’ai vicarié comme j’ai pu l’absence du compagnon de cordée de mon père dans les sommets des Alpes et l’ami de leurs jours heureux. J’ai vicarié comme j’ai pu le silence et la disparition de ce déporté mort au bord d’une route qui m’était devenus au fil du temps d’autant plus insupportable que je n’avais pas de mots pour le dire à une époque où le sujet était encore tabou. J’ai trouvé artisanaux et baroques, les moyens que j’ai pu. A savoir déjà en conserver la trace !

Un beau jeune homme m’ayant prêté un livre dont le prénom du propriétaire indiqué sur la première page était curieux hasard celui de Jacques, j’avais cru à tort que c’était celui de son frère à lui dont il m’avait dit qu’il était mort, et j’en avais été attirée. Mais non, c’était en fait celui de mon futur beau-père à qui appartenait effectivement l’ouvrage que je rendis.

Jacques était aussi le prénom du médecin de l’âme dont l’attention à ma blessure a été telle qu’il m’a sauvé la vie. Sans le savoir, je l’avais dans une liste choisi pour cela et c’est dans son cabinet que je suis partie à la recherche d’un homme dont j’ignorais tout, hormis son nom de disparu. Et comme je demandais au praticien le nom de ma maladie, il avait à juste titre répondu des souvenirs !

Des souvenirs – mais tout aussi bien une absence de souvenirs - qui s’éclaircirent si on ose dire comme la sortie enfin en 1971 du film tourné dès 1969 par Marcel Olphüs Le Chagrin et la Pitié nous révéla l’Occupation et la Collaboration du Régime de Vichy nous faisant alors brutalement passer d’une représentation de la France entièrement résistante propagée par un gaullisme en quête de réconciliation à celle d’un pays tout aussi bien totalement collaborationniste, ce qui n’était pas davantage exact car sinon les trois quarts des Juifs de France n’y auraient pas survécu, comme ce fut néanmoins le cas.

En 1971 le Président de la République Georges Pompidou déclencha le scandale en graciant Paul Touvier le chef de la Milice lyonnaise condamné à mort en 1946 et 1947, outrage public redoublé par la révélation des filières de complicités qui lui avaient permis de s’échapper à la fin de l’Occupation. Décidemment ni La Bataille du rail ni Le Chagrin et la Pitié ne parvenaient à venir à bout de ce passé qui ne passait pas et troublait encore trente ans après la société française…

En 1978 Serge Klarsfeld et sa femme mirent toute leur énergie à faire remonter à la conscience l’évènement abominable dont on ne voulait pas entendre parler. Ils dressèrent à partir des listes des convois, le mémorial de tous les déportés Juifs de France. On vit alors le rappel des faits dans le carnet nécrologique du Journal Le Monde. Des membres survivants des familles y évoquaient le destin tragique de leurs proches, accompagné de cette formule Ni oubli ni pardon qui me sidérait tant elle était contraire à ce qu’on entendait à la ronde. Le tissu commençait à se déchirer laissant apparaître comment la mécanique de la mort avait été à l’œuvre.

En 1985 Claude Lanzmann donna enfin des mots pour le dire. Nommant la chose SHOAH et en faisant le titre de son film de neuf heures enquêtant sur les traces qu’a laissées ce qui s’était produit et dont je pouvais du coup enfin parler comprenant que les quarante années de silence concernant cette épouvante empêchant de vivre avait été une sorte de durée du deuil. Et puis petit à petit les pièces du puzzle se sont assemblées.

Au fil des années il apparut non pas que la France avait été exempte de Camp de Concentration, mais que tout au contraire elle en avait été couverte et que ce grand ensemble de la Muette à Drancy dans la banlieue de Paris en avait été la plaque tournante. Je l’appris un jour terrible y découvrant d’un coup l’installation d’un monument qui n’y était pas lors de mon précédent passage… et m’en approchant pour y apprendre ce que j’y ai lu.

En 1987 ce fut le procès de Barbie, le chef de la Gestapo Lyonnaise et le tortionnaire des enfants d’Izieu, de Jean Moulin et de bien d’autres. Pour l’amener devant ses juges il avait fallu l’enlever d’une Amérique du Sud dans laquelle il se cachait à peine …

En 1993 René Bousquet, secrétaire de la Police de Vichy et responsable de l’horreur qu’on couvre sous l’expression de La Rafle du Vel d’Hiv auquel le Président Mitterrand refusait publiquement de retirer son amitié dont au contraire il se vantait, a été assassiné comme son procès était enfin à l’instruction.

En 1994 Touvier fut inculpé et à nouveau condamné, parce que les réputés Crimes contre l’Humanité avaient été depuis sa précédente et insolente grâce pompidolienne, déclarés imprescriptibles. Il mourut alors en prison.

En 1998 ce fut le tour de Papon Préfet de Police de Paris lors des évènements terribles de la Guerre d’Algérie, notamment les manifestations du 17 Octobre 1961 et du 8 Février 62 à la station du métro Charonne. On fut sidéré de voir devant le tribunal celui qui avait été Ministre du Budget entre 1978 et 1981 devoir répondre de sa responsabilité en tant que secrétaire de préfecture, de la déportation des Juifs de l’Aquitaine. Serge Klarsfeld inventa pour lui la notion de Crime de bureau et trouva équitable la peine de dix ans de prison à laquelle on le condamna mais dont malade, il n’effectua pourtant qu’une partie. Certes le passé ne passait toujours pas, mais au moins toute une partie de la société s’efforçait elle de lui faire une place.

En 2005 chez mes parents décédés j’ai trouvé dans la bibliothèque de mon père un petit livre de montagne de Max Chamson dédié à Jacques Liddell assassiné par les nazis et à un autre comparse qualifiés tous les deux par l’auteur de cet ouvrage de Mes camarades de cordée. Avait été collé en dessous un petit post-it qu’on pouvait éventuellement retirer, sur lequel je reconnus l’écriture de mon géniteur ainsi que son style inimitable.

Médusée j’y ai lu En 1937, 38 et 39 nous étions quatre à faire de la montagne ensemble, Mézigue faisant cordée avec Jacques Liddell, mort en déportation après avoir été fait aux pattes dans les Pyrénées. La formule m’avait scandalisée mais je n’avais pas pu ne pas comprendre non que ce post-it m’était destiné mais au moins qu’au-delà du silence qui avait perduré, mon père montrait ainsi qu’il ne voulait pas que ce drame tombe dans l’oubli, en tous cas qu’il savait bien tout de même que c’était moi qui viderait sa bibliothèque…

J’ai pour écrire cet article, redescendu de l’étagère le dossier que j’y avais remisé non pas parce que j’étais lasse de mes recherches la preuve, elles aboutissent aujourd’hui mais pour arrêter de me cogner la tête sur ces silences et oublis et je lis sur la note que j’ai rédigé pour l’accompagner et le résumer : J’ai entrepris de reconstituer la fin de Jacques Liddell après la mort de mes parents dont il était l’ami. Et elle se termine par cette phrase J’ai abandonné les recherches début 2013 ne pouvant surmonter les difficultés pratiques de langue avec l’Allemagne.

Entre temps c’est dans un restaurant à Weimar lors d’un voyage en 2007 que j’ai entendu à la table voisine des anciens internés de Buchenwald dont le camp est situé sur les hauteurs de la ville et dont on peut lire le nom au fronton des autobus dont c’est le terminus de la ligne, évoquer leur déportation que j’ai osé aller vers le groupe pour demander à l’un d’eux Floréal Barrier, comment je pouvais faire pour retrouver la trace d’un déporté dont je recherchais depuis longtemps la trace. J’ai inscris le nom sur un papier que je lui ai donné et il m’a dit qu’il verrait ce qu’il pouvait trouver à son sujet.

Ainsi m’a-t-il mis le pied à l’étrier en m’écrivant quelques temps après que Jacques Liddell né à Paris le 16 Décembre 1918 avait été interné à Compiègne, déporté le 04 Juin 1944 puis au camp de Neuengamme le 07 Juin 1944 sous le n° matricule 34862 puis ensuite transféré dans le commando Hannover-Stöcken avant d’être évacué vers HannoverAhlen pour décéder finalement à Bergen Belsen le 15 Avril 1945.

J’ai à partir de ces premiers renseignements pu entreprendre des recherches dans des lieux spécialisés dans les services de la Police parisienne qui m’ont demandé s’il était communiste, ce qui selon le type fouillant dans son ordinateur aurait permis de trouver facilement les informations. Mais je n’en savais rien et mes parents ne l’étaient pas.

J’ai contacté des services basés aux Invalides qui m’ont confirmé ce que je savais déjà. Et encore à d’autres endroits dont je n’ai pas nécessairement gardé la trace, tant ils furent nombreux douloureux et inefficaces. On m’y a conseillée de m’adresser aux archives de l’Armée qui m’ont répondu qu’effectivement réfractaire au Service de Travail Obligatoire Jacques Liddell avait été arrêté le 26 Avril 1944 à Luchon alors qu’il tentait de passer clandestinement en Espagne pour rejoindre les Forces Françaises Libres. Pour plus de détail, le Ministère des Armées m’envoyait à Caen où étaient conservés ses dossiers.

Ainsi ai-je eu accès aux témoignages des uns et des autres permettant de reconstituer qu’il avait enseigné l’année 1943 au Lycée de Toulouse avant d’être nommé l’année suivante à Paris et de revenir au printemps 1944 dans la métropole de l’Aquitaine pour passer en Espagne. L’attestation d’un de ses collègues le dit arrêté le 10 Mai 1944 à Bagnères de Luchon.

Un autre témoigne lui avoir apporté du linge à la prison Saint-Michel de Toulouse le 19 Mai où il était resté une quinzaine de jours. Un autre encore qu’il est mort du typhus et d’épuisement à Bergen Belsen entre le 10 et le 14 Avril 1945.

On lit aussi dans le dossier une déclaration de Max Chamson qui dit que Liddell était porteur d’un message pour Londres sans dire lequel. Mais il faisait tout de même allusion à une question concernant des armes. Il affirme également que certains de leurs amis ont entendu que la Radio de Londres avait annoncé son arrestation.

Un inspecteur de Toulouse précise que les archives concernant cette affaire ont été emportées ou détruites et qu’à cette époque les Allemands incarcéraient des détenus dont le contrôle échappait complètement aux autorités françaises. J’ai appris dans le dossier qu’il avait bien effectivement été arrêté par la Gestapo elle-même.

Suivent aussi toute sorte de justification des faits de résistance et de ceux qui donnent droit au qualificatif de Mort pour la France, avec tous les témoignages et les textes juridiques nécessaires à l’application des procédures prévues.

J’y ai même trouvé une attestation de mon père qui me m’a rien appris d’autre que ce que je savais déjà mais me montrait au moins qu’il ne s’était pas autant désintéressé de la question que je l’avais cru.

Entre temps les possibilités d’information et de questionnement sur la Toile se sont étendues de saison en saison et une jeune personne qui savait que je continuais ma quête m’a transmis ce qu’elle avait trouvé sur le site adéquat à savoir à Bergen Belsen l’existence d’une plaque mémorielle qui portait cette inscription : A notre Oncle Jacques Douglas Liddell dit « Jacques le Philosophe » Résistant Français Combattant de la Liberté né à Paris le 16 Décembre 1918, mort à Bergen Belsen en 1945. Et j’en ai éprouvé tout le soulagement que peut fournir l’organisation sociale quand elle soutient l’individu.

 Restaient à approfondir les échanges avec les archives de la Gestapo qui contre toute attente m’avait répondu en m’envoyant un dossier que je devais remplir pour avoir accès aux informations qu’elle détenait mais il fallait pour cela comprendre et écrire la langue allemande. J’ai calé face à cet excès de difficultés.

Non que je ne voulais pas savoir qui l’avait dénoncé et pourquoi. Trainait déjà dans un coin de ma tête le souvenir d’avoir lu dans le dossier qu’il avait été accompagné dans sa tentative de passer les Pyrénées par une certaine Lydia agent double et que j’avais déjà trouvé - toujours sur la Toile - qu’elle avait été acquittée à son procès en 1952 parce que on n’avait pas pu prouver qu’elle était effectivement au courant des activités d’un certain Charles Porel dont elle était la maitresse et avec qui elle faisait équipe.

Lui-même bénéficia de l’indulgence du Tribunal parce que bien que reconnu lui aussi comme agent double il avait été considéré comme agissant dans ses fonctions puisqu’il était officier de l’armée allemande régulière … Il finit tranquillement sa vie en Bavière comme garagiste tout en militant encore avec les néo ? nazis.

J’ai classé le dossier l’allégeant de toutes mes petites fiches sur mon cheminement dans le labyrinthe pour n’en garder que les pièces essentielles de quoi au moins écrire ce texte. La plaie ne s’est jamais refermée ! Je ne parle ni n’écris l’allemand et ne sais toujours pas comment faire pour accéder Outre Rhin aux archives de la Gestapo dont j’ai pourtant l’adresse.

Je continue à intervalles irréguliers à scruter la Toile dans l’espérance qu’un jour la vérité y apparaîtra. C’est là que j’ai lu il y a quelques jours sur le site de Luchon Magazine cette étrange question qui m’a interpellée : Qui se souvient de Jacques Liddell et le message de sa petite nièce qui cherchait de ses nouvelles et sans doute aussi du passé qui ne passe pas.

Celui de l’agrégatif de philosophie qui compagnon de cordée de mon père à 19 ans a été fait aux pattes quelques années plus tard comme il tentait de rejoindre Londres à travers les Pyrénées pour y porter un message qui disait QUOI DONC ?

QUOI CELA qui a travers lui nous concerne tous ?

Paris, 13 Avril 2017

Jeanne Hyvrard

 

J’encourage les jeunes à voir dans cet évènement un signe d’espérance, car à la suite de cette objection de conscience notre lavabo est redevenu fréquentable…

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Mise à jour : avril 2017